Comprendre pour mieux guérir


D’aussi loin que je me souvienne, j’ai cherché à donner du sens à mes expériences et à comprendre le monde qui m’entoure. Petite, je lisais les romans d’Agatha Christie, fascinée par la psychologie de ses personnages.  

 

Comment devient-on un assassin ?

Pourquoi mentons-nous ?

Pourquoi portons-nous des masques sociaux ?

 

Ce n’est que des années plus tard, en explorant ma propre histoire, que j’ai compris que la psychologie seule ne suffisait pas.

Comprendre notre cerveau, observer, écouter, ressentir notre corps sont essentiels, car ce dernier garde l’empreinte des traumatismes.

 

Le lien entre trauma, cerveau et corps

Enfant, nous n’avons pas toujours les mots pour expliquer ce que nous vivons. Nous nous adaptons, même dans la souffrance. La famille reste le cadre de référence, même lorsqu’elle est insécurisante.

La reconnaissance du stress post-traumatique a été tardive. Aux USA, ce n’est qu’en 1980 que des vétérans du Vietnam ont obtenu la création de ce diagnostic.

En France, les liens entre trauma, cerveau et corps sont longtemps restés incompris.

Personnellement, c’est en travaillant au CHS de Rouffach que j’ai découvert la psychiatrie et commencé à entrevoir ces liens. En lisant des rapports du Dr Louis Crocq, pionnier des consultations pour victimes de traumatismes psychiques, j’ai commencé à comprendre que le trauma avait des répercussions profondes sur notre santé mentale et physique.

 

Le silence et ses conséquences

Adolescente, lorsque j’ai refusé de revoir mon agresseur, personne ne m’a écoutée. Alors j’ai enfoui mon trauma sous le tapis, comme tant d’autres. Durant longtemps, peu de spécialistes faisaient le lien entre violences sexuelles et troubles mentaux : dépression, anxiété, troubles alimentaires, somatisations...

Le livre Le corps n’oublie rien du Dr Bessel Van der Kolk paru en France en 2018 met en lumière ces réalités.

Comprendre, ce n’est pas guérir, mais cela permet de mettre du sens sur nos histoires et de se sentir moins seul.e.  

 

« Tu as toujours été différente des autres. »

 

Cette phrase de ma mère m’a longtemps pesée, jusqu’à ce que je comprenne qu’elle résultait de mes traumas et de ma suradaptation à un environnement ni bienveillant ni protecteur. Comprendre, c’était commencer à m’aimer malgré mes différences.

 

Le corps ne ment jamais

Alice Miller l’a écrit : Le corps garde intacte la mémoire de notre histoire. Il ne ment pas. Pourtant, dans une société où moins d’une mère sur dix protège son enfant en cas d’inceste (Hélène Romano), la responsabilité repose trop souvent sur la victime. Aujourd’hui, nous savons que plus de la moitié des patients en psychiatrie ont été victimes d’abus ou de négligence dans leur enfance. Pendant longtemps, l’inceste était présenté comme "rare" et "sans impact" dans les manuels psychiatriques. Or, il détruit des vies.

 

Les traces du trauma

Le trauma n’est pas qu’une blessure psychique, il s’inscrit dans le corps :

  • Dysfonctionnement du système nerveux : anxiété, insomnie, fatigue chronique.
  • Douleurs chroniques : dos, nuque, migraines, tensions musculaires.
  • Impact immunitaire : inflammations, maladies auto-immunes.
  • Troubles digestifs : troubles intestinaux liés au stress.
  • Respiration bloquée : oppression thoracique, apnée du sommeil.
  • Déconnexion du corps : dissociation, sentiment d’être étranger à soi.

 

Ces manifestations montrent que l’impact du trauma est bien réel. Pourtant, nous continuons à soigner les symptômes sans traiter les causes profondes.

 

Pourquoi écrire son histoire ?

L’une des conséquences majeures du stress post-traumatique est la dissociation. Le traitement passe par la réintégration des souvenirs dans une narration cohérente. Écrire, c’est associer des mots, des images, des événements. En écrivant, nous redonnons du sens à notre histoire. Nous reprenons notre place, notre pouvoir. En mettant nos maux en mots, nous raccrochons les wagons éparpillés du passé.

 

Alors, on raccroche les wagons ensemble ?

 

Sylvie 


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